Les phénomènes d’inertie et de frottements au niveau de la couche limite doivent être expliqués brièvement pour mieux appréhender ce qui se produit au niveau du rail.
Les fluides en mouvement, au contact de parois, suivent la forme de la surface car s’en éloigner consisterait à créer des zones de vides et de basses pressions qui recollent immédiatement les particules à la paroi. La zone de fluide ainsi « aspirée » par la paroi est nommée couche limite
Lorsque la différence de vitesse devient importante, entre les particules freinées au contact direct de la paroi, et les particules plus éloignées, une différence de pression proportionnelle est produite (voir Bernoulli). La surpression provoque le décollement des particules en contact avec la paroi. Voir (Rebuffet). Les particules décollées suivent alors le courant général du fluide loin de la paroi et la zone de vide est comblée par des recirculations d’eau, ou d’air si la paroi est proche de la surface. Ce point de recirculation et de décollement de la couche limite est aussi influencé par la courbe de la surface et l’inertie du fluide. La position de ce point évolue donc suivant la vitesse et le rayon de courbure de la surface. Les amateurs de voile observent bien ce phénomène lorsqu’ils règlent leur voile, en surveillant des filaments repère (penons) sur l’extrados : Lorsque les penons s’inversent, ils mettent en évidence le phénomène de recirculation et indiquent au marin que la courbe de la toile est trop forte. Si la vitesse du vent est importante, l’angle de déviation qu’il accepte sans décrocher est faible, la voile doit donc être aplatie et tendue. Si le vent est faible il a peu d’inertie et supporte de virer sans décrocher, la courbure de voile pourra être importante.
. En choisissant le rayon de courbure du rail on peut maitriser la position du décollement et imposer au fluide un changement de direction, ou bien le laisser continuer sa route sans modifier sa trajectoire. L’absence de rayon de courbure (hard rail) force le décollement, le fluide ne modifie pas sa trajectoire, aucune force n’est transmise à la planche. Un rayon de courbure large (soft rail), emmène le point de décollement et en dehors de la trajectoire, en générant une déviation de la masse liquide, exerçant une force sur la planche.
Ces formules permettent d’évaluer les forces que peuvent produire la forme du rail :
Fx = Qm x (Vr -Vr x cos (α)) Équation 55
Fy = Qm x Vr x sin (α) Équation 56
Prenons pour exemple un rail soft dans un flux relatif de 20 km/h (5.5m/sec). Supposons aussi que l’angle de planing est nul pour analyser uniquement l’impact du rail sur l’écoulement. Evaluons les effets de rail sur une largeur d’élément de 0.3m. Estimons que ce rail soft possède un point de décollement à 0.02 m du fond (longueur L dans le schéma) et calcu-lons les forces pour des angles α de 10° à 40°. 40° étant l’angle maximal qui puisse être appliqué sans décollement, au-dessus de cet angle, le flux ne suivra pas la courbe et l’on peut considérer l’écoulement, décroché comme sur un hard rail, donc sans force d’aspiration de rail. Notons que le décollement peut être provoqué par un défaut de rugosité, ou une marque sur la surface. Le ponçage de la jonction des glaçages de pont et de fond doit donc être soigné au niveau du rail pour éviter de déclencher un décollement non souhaité.
Notons que le point de décollement modifie la longueur mouillée de l’élément, donc la surface de planing totale. Nous considérons ici cette variation comme négligeable et estimons la position de décollement de manière très approximative, nous proposons plus loin une méthode de calcul de cette position de point de décollement, mais pour l’instant cette approche nous suffit pour évaluer l’impact du rail.
Ce graphique montre qu’une zone de rail soft de 0.3 m de large, avec un angle de décollement de 40 ° peut pro-duire une aspiration Fy, maximale d’environ 7.5 kg (75N) aidant le surfeur à immerger son rail dans la vague. Une composante Fx d’environ 3 kg (27N) vient s’ajouter, elle produit une aspiration du nez de la planche vers l’intérieur de la vague, aidant le surfeur à plaquer dans la verticalité du Still point. Notons que le rapport Portance/trainée est plus grand aux faibles angles de décollement.