Position longitudinale des ailerons
: La définition de la manœuvrabilité d’une planche est donnée par l’effort à produire pour mettre en rotation la planche et son surfeur suivant un axe donné.
Nous avons montré dans le chapitre décrivant l’outline que cet effort varie avec la distance séparant le centre de gravité du surfeur du centre de pivotement de la planche.
La manœuvrabilité théorique maximale est obtenue lorsque le centre de gravité du surfeur coïncide exactement avec l’axe de lacet(yaw). Lorsque le surfeur engage un virage radical, il ramene son centre de gravité au niveau du centre de portance global des ailerons, car toute distance l’éloignant de ce point tend à augmenter l’effort necéssaire pour tourner autour de cet axe. Lorsque la rotation est terminée il se replace en avant en recherche de vitesse.
Pour illustrer ce phénomène, nous citerons Christophe Mulquin. Dans son ouvrage analysant les manœuvres du surf (Mulquin), il décrit les appuis du rollers et l’importance du gainage de la colonne vertébrale ainsi : Roller sur le centre de pivot des ailerons. Jeremy Flores (Mulquin, s.d.)
« …Ce mouvement rotatif, rapide, vif en équilibre, ne peut être de bonne facture que si les appuis sont de qualité. Il y a un enchainement parfaitement complémentaire d’appuis entre l’arrière et l’avant. Durant la phase d’ascendance, lorsque l’on monte vers la lèvre c’est plutôt l’appui arrière qui est privilégié. Durant la rotation sur la lèvre, l’appui est essentiellement sur le pied arrière qui joue le rôle de pivot, de pointe de compas. Lors de la phase de descente c’est plutôt un appui pied avant qui prédomine. Le problème des appuis sur cette manœuvre est qu’il y a une succession incessante des appuis, il y a de perpétuelles corrections entre les appuis avant arrière et latéraux…Le gainage prend tout son sens sur le roller. Une forte rota-tion de la partie supérieure du corps est transmise par la ceinture abdominale. La force de ce couple est transmise sur les cuisses… ».
Le déplacement sur l’arrière vient donc aligner le centre de gravité du surfeur sur le centre de pivot effectif de la planche, résultant en grande partie de la position des ailerons.
planche directionnelle sous vireuse : l'aileron aligne la planche dans le flux et l’aileron reste bien immergé.
Avancer les ailerons diminue la distance de déplacement avant-arrière à parcourir pour fusionner ces centres, ceci rend la planche plus facile à manœuvrer et relancer.
Mais trop avancer l’aileron dégrade la stabilité de la planche dans les phases rapides.
L’appuis avant sur le rail immergé génère de l’accélération, mais il doit être compensé par une position reculée des ailerons : Un aileron reculé entraine l’arrière de la planche dans le sens du flux relatif. Il en résulte un alignement automatique de la planche, positionnant l’avant de la planche face au flux, et l’âme (stringer) parallèle à la direction du flux relatif. Ce caractère auto stable est la directionalité. (définition : caractère directionnel, de ce qui oriente) La directionalité stabilise la planche et compense la trainée de l’avant de la planche, qui tend à faire remonter le nose vers la crête.
aileron en arriere generant de la directionalité.
Si l’aileron ne réaligne pas l’arrière de la planche dans le flux, la trajectoire du surfeur remontera trop et le décrochage du rail freinera le surfeur en le mettant en travers. Ceci arrive lorsque l’aileron ventile, décroche, ou casse : la planche part en tête-à queue, elle survire. Avec un aileron bien reculé et immergé, le surfeur peut aller se promener sur le nose sans modifier la direction de la planche. Ce comportement apporte de la sécurité dans les grosses vagues, c’est la planche qui commande accrochez-vous et priez pour que la ligne droite soit le bon chemin ! Si on place l’aileron central trop en avant il aura aussi tendance à sortir de l’eau trop souvent dans les sections rapides verticales et un excès de manœuvrabilité peut entrainer de l’instabilité contraignant le surfeur à toujours garder le contrôle sans pouvoir se reposer sur la directionalité de la planche…
aileron en avant generant de l'instabilité.
Il résulte de ces effets un compromis entre manœuvrabilité et stabilité :
• Ailerons en avant = manœuvrabilité
• Ailerons en arrière = stabilité et directionalité
Angle de Toe :
Classiquement l’angle de toe génère de la manœuvrabilité et repousse le décrochage dans les manœuvres radicales en réduisant l’angle d’incidence apparent dans les trajectoire courbes. Un profil à extrados cambré dans le sens de la portance recherchée augmente incontestablement l’appui, mais implique aussi une symétrie antagoniste des ailerons latéraux. Ces antagonismes d’angle et de cambre statiques induisent malheureusement de la trainée et l’obligation de sortir l’aileron antagoniste de l’eau pour obtenir des manœuvres propres.
La technologie d’adaptation dynamique de l’angle d’attaque et de la cambrure des ailerons récament apparue (système ADAC Fynsurf) , suppriment l’antagonisme nuisible, et augmentent les effets positifs du cambre et de l’angle d’incidence en adaptant la cambrure et l’angle de tous les ailerons suivant la trajectoire dynamique du surfeur : Trainée résultant d’angles de toe antagonistes avec des ailerons Static traditionnels, et système ADAC a angle de toe a adaptation dynamique :
Angle de Cant :
Un aileron est formé par empilements de profils se succédant le long d’une génératrice. La portance d’un aileron est perpendiculaire à la direction du fluide, et perpendiculaire à la génératrice de l’aileron. L’angle de cant génère donc une composante de portance dirigée vers la planche, dans des proportions relatives au sinus de cet angle qui est d’environ 4° dans les configurations classiques. Notons ici que le sinus de 4° = 0,069, donc pour une force de portance de 10 Newtons la com-posante résultant de l’angle de cant est de 1*0.069= 69 grammes. Un angle de cant de 4° produit donc des effets difficilement détectables. Dans ce cas cet angle relève plus de l’esthétique que de la performance.
Lorsque cet angle est très important (90°), et que la taille de l’aileron se rapproche d’une aile, les effets sur l’équilibre de la planche deviennent très importants. L’hydrofoil est un exemple de ce cas ou la portance des ailerons devient la part la plus importante de la portance globale de la planche.
Dans ce cas l’angle de cant devient le « diedre » de l’aile.
LES CONFIGURATIONS D’IMPLANTATIONS
SINGLE fin:
Pour diriger leurs longboards sans dérives, les surfeurs de l'époque (1930-1940) plongent brièvement le pied dans l'eau pour faire virer la planche. Mais le besoin de prendre appui pour contrôler la trajectoire sans déraper est bien réel. On peut attribuer l'invention de la dérive de surf à Tom Blake en 1934.
Tom Blake
L'implantation de cet aileron révolutionne le surf en autorisant des figures impossibles auparavant, il permet de stabiliser la trajectoire et de prendre un meilleur appui sur le rail tout en créant un pivot arrière pour virer et changer de direction. Mais malgré son indiscutable efficacité, cette innovation proposée par Blake en 1934, prend du temps à être adoptée du fait de sa relative difficulté d'implantation et le danger qu'elle constitue aux yeux des surfeurs de l'époque.
Aileron 1935
Ce qui est amusant avec le recul c’est que cette notion de danger est devenue naturelle, et que les ailerons a bords souples sont délaissés par la grande majorité des surfeurs d’aujourd’hui, craignant davantage d’entailler leur image de guerrier invincible plutôt que leurs corps désarmé.
De 1935 à 1960 la hauteur de l'aileron ne cesse d'augmenter, le point d'appui est de plus en plus efficace et permet des virages de plus en plus serrés, la radicalité du cut back et du bottom turn sont liées à cette évolution. Le single de 1960 atteint une limite qu’il ne peut franchir lorsqu’il est implanté au centre de la planche, la ventilation.
Le TWIN :
Simmons propose le twin en 1949 pour éviter la ventilation des ailerons centraux trop courts :
Avec la configuration de Simmons, même si un aileron sort de l’eau et ventile à cause d’une paroi de vague très verticale, ou d’un virage entrainant un fort roulis, l’aileron sous l’eau prend le relais, il faut un aileron pour les 2 côtés de virage rencontrés dans les trajectoires du surf. Le twin de Simmons a des implantations quasiment parallèles. plus tard, un léger angle de toe prendra en compte le fait que le flux d’eau arrive de côté lorsque l’on surf une vague dans sa zone verticale.
Les planches des années 70 deviennent de plus en plus courtes, au fil du temps, leur maniabilité est augmentée de ce fait, et les virages deviennent donc de plus en plus radicaux. Les virages engendrent une variation de direction de flux sur les dérives :
Pas de virage : direction vers la plage, l’eau arrive parallèle a l’axe de la planche.
Le mouvement de rotation du surfeur, engendre une variation de direction de l’eau sur les dérives pendant le virage.
Plus le mouvement de rotation est radical, et plus la vague est verticale, plus l’angle de l’eau arrivant sur les dérives est important Lorsque l’angle d’attaque du fluide est trop impor-tant, sur aile, comme sur aileron de surf, l’efficacité chute brutalement, c’est le décrochage.
C’est dans la phase de virage la plus prononcée que ce décrochage intervient. La solution pour éviter, ou repousser le décrochage, est de diminuer l’angle entre l’eau et l’aileron. Ceci se fait en implantant l’aileron avec un angle compensé pour les virages radicaux, c’est l’angle de Toe (pin-cement des dérives qui « louchent » vers l’avant de la planche).
Le Fish des années 70, prévu pour jouer dans des petites vagues avec des virages radicaux, augmente les angles de toe, et avance la position des ailerons pour les rapprocher du centre de gravité du surfeur et générer de la maniabilité. Mais ceci se fait au détriment de la stabilité et devient difficile à gérer dans les vagues de taille plus importantes ou la directionalité est un gage de tranquillité.
Le thruster :
La solution pour concilier le plaisir de la maniabilité du twin et la directionalité apaisante du single, est apportée par la configuration truster. Cette configuration c’est largement imposé au fil des années. Mais Le défaut d’une configuration avec des ailerons ayant des angles de toe antagonistes est un freinage plus élevé qu’avec des angles de toe parallèles.
Sur le Fish, joueur dans des petites vagues creuses, le bon surfeur sort l’aileron antagoniste de l’eau le plus souvent possible, et accepte de subir un freinage dans 90 pourcents du temps de ses trajectoires ou il a les 2 ailerons dans l’eau, mais comme nous l’avons dit, le surfeur de Fish est joueur et ne cherche pas la performance de rapidités, c’est un esprit « skateur ».
Pour le thruster, c’est trois angles de toe différents et la volonté de surfer des vagues parfois puissantes et rapides, la performance dégradée par le freinage d’ailerons avec des angles mal accordés peut être une limite lorsque la vagues est très rapide, grosse et jette sa lèvre et le surfeur en retard sur un parterre de coraux.
Le quad :
Pour les surfeurs exigeants et de haut niveau, surfant des vagues très creuses et rapides, il peut y avoir un intérêt à placer un aileron avancé proche du rail pour ne pas ventiler et avoir de la maniabilité, et un autre aileron proche du rail aussi pour ne pas ventiler, et avec un angle de toe relativement proche de son copain de devant pour éviter de créer trop de freinage. L’aileron latéral en arrière apporte une directionalité stabilisante dans les puissantes vagues ou l’erreur de trajectoire se paye cher ! Cette configuration est avantageuse pour des vagues très rapides et très verticales, impliquant qu’uniquement deux ailerons soient immergés, et que les ailerons antagonistes soient hors de l’eau. Ce type de configuration 4 ailerons trouve son application dans les vagues d’exceptions surfées par des surfeurs d’exception ! Mais elle peut avoir aussi son utilité pour créer une configuration de twin, modifiables suivant les conditions de surf, et passer de la configuration twin Fish avec forts angles de toe et ailerons sur l’avant, pour créer une grande maniabilité et un caractère très joueur, et ensuite passer sur un twin type Simmons avec les aile-rons reculés et quasiment parallèles et ainsi proposer une planche rapide dans les vagues creuses. Les emplacements seront donc utiles mais pas tous utilisés en même temps. C’est certainement l’emplois le plus utile de cette configuration pour 90% des surfeurs.
Five fins:
Comme le quad mais avec une possibilité de configuration en thruster ou single, cette configuration est parfaite pour les surfeurs désireux de tester les meilleures configurations en fonction de leur humeur et type de vague du jour. Le surfeur demandant ce type de configuration à son shaper a sombré du côté expérimentations des forces, il est probable qu’il ne puisse jamais en revenir car cette quette est sans limite !
Duo :
Nous avons vu que le single trouvait sa limite lorsque la radicalité des virages ou la verticalité de la vague conjuguée à la rapidité de la section, impose d’utiliser des ailerons plus proches du rail pour limiter la ventilation et la perte d’accroche. La configuration duo permet de se rapprocher du rail pour ne pas ventiler lorsque le centre de la planche sort de l’eau, tout en conservant des ailerons parallèles, pour ne pas perdre de vitesse à cause des angles de toe antagonistes freinant. En gardant le centre de por-tance proche du centre de planche, l’effet de devers est limité, et l’immersion du rail est plus facile, c’est une configuration inté-ressante pour des vagues relativement lentes demandant une grande surface d’ailerons, et un surfeur désireux de fortement enfoncer le rail dans des carves ou il risque de sortir l’aileron central de l’eau.
Fyn line :
Lorsque le single n’offre plus assez de portance dans les vagues qui ouvrent sans générer de grandes vitesses, une plus grande surface d’aileron peut s’avérer nécessaire. Mais la volonté de conserver des appuis de rails optimum en limitant le devers au maximum impose une position centrale du centre de portance de l’aileron. Cette configuration est applicable uniquement avec des ailerons dynamiques, generant la maniabilité grâce a leurs angles de toe dynamiques adaptables.